vendredi 22 mai 2009

Le bras de fer des pots de verre...


A l’annonce de la fermeture de leur usine, les salariés des VMC ont choisi de se mobiliser, montrant ainsi leur attachement à un établissement ancestral. Rencontre au pied du piquet de grève.

Sur la route, aux abords des murs tagués et de l’entrée gardée, les automobilistes klaxonnent allégrement, affichant ainsi leur soutien aux salariés d’une entreprise historique : l’ancienne usine VMC (Verreries Mécaniques Champenoises), qui aurait fêté ses 100 ans en 2011, a déjà presque l’air désaffecté. Les bâtiments sont vétustes, et seules les caméras de surveillance rappellent encore la présence d’une activité pourtant prospère : les salariés les plus résignés traînent devant l’usine, la mine fatiguée, continuant le travail en attendant de voir leur sort se sceller. A l’annonce des problèmes, il y a bientôt 3 semaines, d’autres se sont enfermés chez eux pour déprimer : leur entreprise, aux mains d’un groupe américain (O-I Manufacturing), va fermer en août prochain et l’activité sera délocalisée, afin « d’augmenter la productivité et de conquérir une compétitivité sur le marché européen ». Des petits pots à la pelle, Nutella, Nescafé, la Laitière (750 000 pièces journalières), qu’on choisit de faire voyager : les fours vont s’arrêter, le site sera nettoyé et tout cela a un goût de fatalité.

Briser la glace…
Et puis il y a les battants, syndicalistes qui campent là jour et nuit, à renfort de jeux de cartes, de pétards et autres paquets de chips : un rituel presque festif, une résistance qui s’organise, à laquelle viennent participer épouses et retraités. « On ne croit pas vraiment pouvoir changer quelque chose », confie pourtant l’un d’entre eux, âgé de 54 ans dont 33 passés aux VMC. « Le groupe n’est pas vendeur, impossible à partir de là, de trouver un racheteur. Mais il faut quand même agir, faire du bruit et communiquer. Sinon, il n’y aurait plus rien à espérer ». Sur les 146 salariés des VMC, une quarantaine devrait retrouver une place sur l’autre site rémois, producteur de bouteilles et tenu à l’écart du plan social. Pour les 100 autres, un reclassement serait prévu en Auvergne, à Puy-Guillaume, où le groupe projette de transférer l’activité. Si certains sont prêts à « faire les chemins », au moins au début, d’autres sont attachés à leurs habitudes. « Ma vie est ici, ma famille, mes amis, il n’est pas question de partir. Cela fait 30 ans que je m’investis dans cette entreprise, on peut encore espérer la sauver ». Les plus jeunes, employés comme « polyvalents », s’étonnent également mais devraient avoir moins de mal à se réinsérer, que les ouvriers plus spécialisés.

Vers la transparence
Car « plus que de 150 salariés, c’est la perte d’un savoir-faire qui est en jeu », martèle Eddy Lefèvre, représentant du comité d’entreprise, exposant son dossier au député UMP venu justement l’écouter. Entre promesses de remontée ministérielle et invitation à la discussion, l’espoir renaît chez les plus motivés. Sur le parking, on se rappelle le temps passé, sans comprendre comment on en est arrivé là. « L’usine réalise 17% de marge, c’est très important, et les carnets de commande sont bien remplis », note Fabrice Perreau, n°2 de la résistance. « La fermeture va engendrer un coût de 80M d’euros, entre la dépollution d’un site centenaire de 12Ha, la remise en conformité des fours qui seront exploités ailleurs et le plan social lui-même. Pour « seulement » 146 familles concernées, on ne comprend pas l’intérêt ». Le directeur, justement, traverse la route et vient saluer les salariés : une poignée de main pour chacun, solennelle et silencieuse, d’un homme qui subit aussi les caprices des américains. Une expertise va être demandée et la lutte, sans doute, devrait continuer.

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